une femme, en Mauritanie
A NOUAKCHOTT, UNE FEMME , DES FEMMES
(photo du web)
un matin de dimanche, je pars me promener dans les quartiers environnant mon hôtel.
le quartier est assez sympa, propre et calme
eau à la disposition des passants à la porte de beaucoup de maison
toujours ces couleurs dragées
dimanche matin, grand calme
outre en peau e chèvre pour la réserve d'eau
au hasard.
je tombe sur une maison "association des femmes chef de famille de Mauritanie"
intriguée, je décide d'y retourner le lendemain.
je suis bien reçue, aimablement, dans une maison qui ressemble un peu à une ruche : du monde et du bruissement.
Je fais connaissance avec les femmes de cette association, et de la présidente, une jeune femme mauritanienne noire.
S. me fait connaitre cette association : il s'agit de lutter contre les maltraitances faites aux femmes : et principalement les violences conjugales et les mariages et grossesses précoces.
(photo du web)
les violences conjugales, ainsi que l'âge du mariage des femmes ont fait l'objet de lois qui de fait ne sont pas respectées partout , et de très loin, dans la société. Ou uniquement dans certains milieux aisés, et encore.
l'association agit donc
- pour que la loi soit appliquée : elle encourage les femmes à déposer plainte, à aller témoigner. Elle met à leur disposition des juristes, avocats, hommes et femmes mauritaniens, des lieux de protection s'il le faut (avec bien des difficultés)
- elle les aide à trouver emplois et/ou formation (difficile aussi)
- elle élabore avec les femmes des méthodes de lutte qui correspondent à la culture patriarcale mauritanienne. Contre les violences physiques, les répudiations suivies de mises à la porte des femmes de leurs maisons, elles utilisent le fait que "l'honneur" d'un homme est que tout aille bien chez lui, ou que chacun croit qu'il en est ainsi; de plus, frapper une femme est officiellement une honte ........ la fierté ! ! ! (et j'ai vu à quel point cette fierté se porte haut dans ce pays), les femmes vont l'utiliser : par exemple : ,avec leur association, elles vont aller devant le domicile de l' homme ciblé, et, avec des porte-voix, mettent le quartier au courant de ce qui se passe. en général, la honte est trop forte, l'homme violent essaie de se calmer, abandonne l'idée de jeter sa femme dehors ect ....
ceci dans un premier but : ne pas voir les femmes aller dormir dans la rue avec les enfants.
ces femmes sont toujours suivies par les autres femmes et les juristes de l'assoc. pour d'éventuels développements.
- est mis en place un programme de changement des mentalités qui passent par des campagnes sur les réseaux sociaux, des films sur youtube et dailymotion, des participations à des émissions de chaines TV privées.
cette association participe à des colloques aux niveau africain et mondial, pour des échanges d'expériences, de la formation. S voyage pas mal ainsi. Ses voyages sont subventionnées par de grandes organisations internationales.
l'association n'est pas illégale, mais elle a fort mauvaise presse en "haut lieu", n'est pas soutenue par l'Etat; au contraire, ses membres font l'objet de diverses pressions publiques et privées (ex : aucune banque n'accordera un prêt à une des femmes de l'association).
la rencontre avec S. a été passionnante : j'ai découvert avec elle des lieux où je ne serais jamais allée seule : les confins de Nouakchott, des quartiers improbables, très très pauvres, sans route et quasiment sans eau ni électricité. posées sur le sable, ces cubes de béton (ici vues du ciel, photos du web) cachent des logements insalubres, une population laissée pour compte. et des tonnes d'immondices.
prenant le thé (les fameux et délicieux "3 thés"), assises toutes deux sur un tapis sur la marche de béton devant sa boutique (S. finance ses actions et la scolarité de ses enfants par la vente de fripes dans ce quartier où elle habite), je vois venir vers elle de jeunes hommes qui connaissent ces positions sur le mariage précoce, et qui viennent pour discuter (leur projet étant ce type de mariage dans un proche avenir).
Inlassablement elle explique, sans jamais élever la voix, et je vois qu'elle est très respectée.
Comme je suis là, moi, étrangère, occidentale, ils me demandent ce que j'en pense : le dialogue en hassanya-anglais-français n'est pas simple, mais on y arrive
le conjoint de S est d'accord pour qu'elle mène ce combat, à charge pour elle de le financer, et de financer aussi la garde de ses plus jeunes enfants. (scolarité et petite crèche pour le bébé). sa maman la soutient également.
curieusement : je n'ai jamais trouvé l'espace pour parler de l'excision (encore très largement répandue en Mauritanie, dans tous les milieux) ni de l'esclavage, encore vivant, j'en ai été le témoin à Nouakchott même. idem pour le gavage des femmes, j'ai vu de ces femmes gavées dans Nouakchott et ailleurs.
S m'a reçue dans sa famille, me donnant ainsi un aperçu du mode vie mauritanienne.
les grands tapis, les coussins, la famille élargie, le repas partagé, la sieste (aussi partagée ) la place de chacun dans les tâches familales, ect ....
merci merci S.